Les conséquences de la prostitution

1.       Sur la personne :

La prostitution est un métier à risque. Il y a, en effet, tout d’abord le risque, pour les personnes prostituées, d’attraper toutes sortes d’I.S.T et me le SIDA et de la transmettre, à leur tour, aux clients éventuels. D’où les contraintes qui leur sont imposées de subir un suivi médical périodique avant la délivrance du « fameux » carnet de santé leur permettant d’exercer librement leur profession. Il y a, ensuite, le risque de se faire agresser sexuellement ou physiquement.

La prostitution est donc loin d’être un métier de tout repos comme on le pense souvent. Car, on y expose et sa santé et sa vie.

Enormément de risque donc contre un peu d’argent, pourquoi ?

Cette question est révélatrice du degré de notre ignorance face au drame psychoaffectif que vivent la plupart des personnes prostituées. Mais le témoignage poignant de cette prostituée que nous appellerons Ndèye peut nous édifier : « Depuis le moment où ma dignité de femme et d’être humain m’a été volée, j’ai constaté que je n’ai cessé de vivre et de revivre à l’infini les mêmes rapports d’abus émotionnels, physiques et sexuels avec divers hommes… je me suis mise à suivre des hommes chez eux, des inconnus rencontrés dans la rue. Je les ai suivis, les ai laissés utiliser mon corps et suis repartie. Et chaque fois, pendant toute l’opération, je n’ai pas prononcé aucun mot, comme si une partie de moi avait accepté l’idée que je ne valais pas plus que le plaisir qu’un homme, n’importe lequel, pouvait prendre sur mon corps… je ne décrirais pas le nombre de fois où je me suis laissé faire par des hommes qui ne me plaisaient pas, qui me dégoûtaient… Mais, jamais au point où je me dégoutais moi-même ».

A travers la prostitution donc, rejaillissent, sur la personne, les conséquences de l’inceste, de l’abus sexuel ou du viol. Il se trouve, en effet, que la victime est, dès l’instant de son agression, devant l’obligation d’avoir à gérer les pires paradoxes qui soient au risque même d’altérer profondément son fonctionnement physique. Car, de son silence ou de sa parole dépend soit la suite de calvaire, soit l’éclatement de la famille ou du réseau familial. Mais être la cause de la destruction de sa famille de l’opprobre jetée sur elle et / ou l’un de ses membres, est une responsabilité que peu de personnes osent prendre seules ou sans aide.

Le silence de la victime va alors permettre le maintien de la cellule familiale et sa stabilité au prix de relations sexuelles non choisies, dégradantes, secrètes prohibées et extrêmement destructrices pour son développement pour son développement psychoaffectif, sa vie sexuelle future et son estime de soi.

C’est donc un véritable drame qui se vit dans la prostitution. Celui d’une personne victime d’inceste, d’abus sexuel ou de viol qui garde le silence ; un silence auquel répond celui de la personne prostituée qui ne dénonce jamais ses clients pour permettre une certaine stabilité sociale, et même familiale (les conjointes sont rarement averties du fait que leurs compagnons sont clients de prostituées).

 

2.       Sur la société :

Par rapport à la société traditionnelle où les vertus de « diom » ont toujours été cultivées, de « kersa », la société sénégalaise d’aujourd’hui a, semble-t-il, complètement perdu son âme, en effet, la seule vraie vertu à laquelle tout le monde fait référence recherche de l’argent et qu’importe la manière dont il sera acquis. Ainsi, s’enrichir à tout prix est devenu le maitre-mot à tous les niveaux de la société. Comment s’étonner donc que des personnes prostituées, chez qui se voient tous les signes extérieurs de l’aisance matérielle, soient adulées par des communautés entières ?

La prostitution donne donc l’impression d’être un métier dans lequel la possibilité est offerte de s’enrichir très rapidement. Le phénomène ne cesse alors de se développer en maints lieux, colonisant plus récemment beaucoup de localités du pays où cette activité échappe plus facilement au contrôle de la police et des autorités sanitaires, mais aussi aux associations offrant des services aux personnes prostituées.

Ces nouveaux « territoires » de la prostitution, déplaçant l’activité de la rue au domicile (ou autre lieu de rendez-vous) et modifiant le mode de recrutement des clients, donnent le sentiment aux personnes ayant des relations sexuelles en échange d’argent d’exercer une activité de call-girl ou d’escrot-girl, termes souvent  utilisés dans le sex-business, non de prostitué(e), tant le mot même de « prostitution » ou de « prostitué(e) » résonne péjorativement, en écho de toutes les déclinaisons sémantiques possibles : putain, pute etc.

On assiste donc à une banalisation de la prostitution qui est pratiquement devenue un métier comme les autres. Il n’y a alors plus de honte à se prostituer, l’essentiel étant de gagner sa vie. Mais gagner sa vie en vendant son corps ; dans quel univers vivons-nous ?
Bien sûr, dans un monde où la contamination aux I.S.T /S IDA n’est pas prête de s’arrêter si rien n’est fait.

 

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